28/02/19 | Travail d’artiste, ou l’art de survivre | Débobine & débats
J’aurais voulu être un artiste, chantait le businessman à la recherche du sens de sa vie, avant de retourner à ses affaires parce qu’il n’est pas fou. C’est que le métier d’artiste ne nourrit pas forcément son homme. Ni sa femme. Euphémisme. Une carrière artistique se construit en général autour de projets, donc par intermittence, sans aucune perspective de CDI, avec de longs moments de travail non payé. Cette discontinuité justifie un régime de chômage particulier, inventé à la base pour permettre aux pêcheurs en mer et aux bûcherons de survivre aux changements de saison : le fameux statut d’artiste, sorte de revenu minimum garanti, appelé parfois win for life par les autres catégories de sans emplois, condamnés pour leur part à l’opprobre, à l’autojustification permanente et à la dégressivité des allocations. Mais qu’on ne s’y trompe pas : beaucoup d’artistes guigneront ce fameux statut comme un Graal inaccessible. Les conditions pour l’obtenir ne correspondent que rarement aux pratiques des métiers, nombre de candidat.es en sont d’ailleurs réduit.es à s’acheter les contrats qui leur vaudront le quota de jours nécessaires. Et une fois acquis, le statut ne préserve pas des tracasseries administratives abracadabrantesques, demandez aux artistes, les témoignages sont édifiants.
Qu’est-ce qui, dans le monde du travail aujourd’hui, pousse, alors, de plus en plus de jeunes à se tourner vers des disciplines artistiques à haut risque ? Peut-on parler de précarité choisie? Quel avenir pour ce fameux statut quand la chasse aux chômeurs et aux chômeuses est déclarée ouverte en période électorale? Quels modèles alternatifs se mettent en place, au bénéfice de qui et à quel risque? Le modèle SMART, qui a profondément impacté le fonctionnement du monde artistique, préfigure-t-il ce que sera l’emploi de demain? Quand on sait que le monde de la culture pèse plus dans le PIB que – au hasard – l’industrie automobile, comment expliquer cette précarité de celles et ceux sans qui rien n’existerait? Et puis, peut-on, au nom de la passion, accepter de travailler gratuitement? Qu’est-ce que les artistes disent de la valeur travail dans le monde d’aujourd’hui?
Autant de questions qui seront peut-être abordée après la projection de Birdman avec un membre du RISA – Rassemblement des Intermittents du Secteur des Arts – et Lise Mernier (Chargée de projets à PointCulture Bruxelles et doctorante en analyses cinématographiques à l’ULB). La rencontre sera animée par Etopia.
Film de la soirée
Birdman or (The Unexpected Virtue of Ignorance) de Alejandro González Iñárritu avec Michael Keaton (2014, 119’, USA)
Riggan Thomson, ancien acteur déchu, tente tant bien que mal, constamment confronté à lui-même et aux autres, d’échafauder sa pièce de théâtre à Broadway. Mais tout autour de lui résonne encore l’écho de Birdman, ce super-héros pour lequel Riggan avait, à son heure de gloire, prêté son image et sa vie.
Où et quand
- le 28/2 à 19h00 au PointCulture Bruxelles (accueil: 18h30, film: 19h, débat: 21h)
- Prix libre et conscient (snack bio compris)
- Pas de réservation
Partenaires
- RISA
- FACIR
- Etopia
- Centre Librex
- Gresea asbl