19/03/2010 – Anne Bernard
Depuis plus 30 ans, le Centre régional du Libre Examen ou Librex de Bruxelles a pour objectif la diffusion du principe et de la démarche du libre examen. En tant que mouvement laïque, il encourage le dialogue entre les communautés de vie des citoyens, qu’elles soient d’ordre philosophique, convictionnel, social ou culturel. En tant qu’association d’éducation permanente, il tente de créer un espace de liberté, de dialogue et de réflexions où chaque citoyen peut frotter et limer son esprit contre celui des autres, développer sa pensée critique personnelle, éveiller sa conscience et exercer son libre engagement sans tabous ni contraintes. Colloques, conférences, Banquets Républicains, journées d’échanges, publications, débats autour du cinéma et du théâtre, rencontres citoyennes dans les écoles, constituent l’essentiel des activités du Centre. Elles sont conçues pour ouvrir le débat sur les réalités et les problématiques d’une société en mouvement, notamment sur deux enjeux majeurs : la promotion de la laïcité et l’égalité entre les femmes et les hommes, et plus largement l’égalité sous toutes ses formes.
L’insertion sociale des jeunes originaires de l’immigration est un défi plus que jamais d’actualité dans le contexte de crise économique que connaissent la Belgique et plus largement l’Europe. Elle se heurte à de nombreux obstacles, dont la discrimination à l’embauche n’est pas des moindres. Les difficultés rencontrées par ceux qui subissent des pratiques discriminatoires de la part de certains employeurs requièrent tout un arsenal de mesures pour être surmontées. Celles-ci sont variées, ainsi que les acteurs chargés de les mettre en œuvre. Tout d’abord, une batterie d’instruments juridiques s’est peu à peu constituée depuis les années 1980 : lois au niveau fédéral, décrets et ordonnances dans les régions et les communautés, directive européenne… Une institution publique comme le Centre pour l’Egalité des Chances et la Lutte contre le Racisme (CECLR) est par ailleurs chargée de jouer le rôle de médiateur, de conseil et de soutien juridique à destination des victimes de discrimination. Mais cet ensemble juridico-institutionnel est loin d’épuiser l’étendue des acteurs de l’insertion socioprofessionnelle intéressés par la question : Actiris, organisme régional chargé de la politique de l’emploi dans la région Bruxelles-capitale, les missions locales, ou encore une entreprise d’intérim social comme Exaris Intérim sont des acteurs essentiels de l’inclusion socioprofessionnelle. Cet enjeu transcende donc à la fois les niveaux de pouvoirs (fédéral, régional) et les secteurs (public, privé, public/privé, économie sociale).
La lutte contre l’exclusion sociale des plus défavorisés nécessite donc l’intervention d’un maillage complexe d’acteurs qui s’efforcent au quotidien de favoriser l’insertion durable sur le marché du travail de ceux qui sont le plus démunis en ressources pour y accéder. Leur action peut être utilement complétée par une réflexion scientifique sur le phénomène de discrimination : les résultats de la psychologie sociale nous révèlent en effet que la discrimination à l’embauche, pour être comprise dans toute sa complexité, doit être vue comme une réalité à deux facettes. D’un côté, des actions ou comportements discriminatoires du fait des employeurs écartent une frange de la population de l’accès à l’emploi, tandis que de l’autre, des dispositions psychologiques intériorisées par les demandeurs d’emploi eux-mêmes et désignées par le terme d’auto-discrimination constituent une barrière supplémentaire à franchir – intérieure et passive celle-là mais tout aussi handicapante – dans la quête d’un emploi. La recherche en sciences sociales apporte donc un éclairage essentiel permettant de mieux appréhender et donc de mieux combattre le fléau de la discrimination.
Tel était l’enjeu du séminaire organisé par le Centre Régional du Libre Examen dans ses locaux du 66 rue Coenraets vendredi 19 mars, dans le cadre des Assises de l’Interculturalité. La complémentarité des éléments juridiques, institutionnels et scientifiques du débat ainsi que la qualité des interventions des participants et du public présent ont fait de ce rendez-vous un moment stimulant de réflexion collective.